Nouveau départ

Les drapeaux du lion d’or flottaient au loin, surplombant la grande cité. Sibelle eut un sourire appréciateur en découvrant l’endroit où son père espérait la voir faire sa vie – la cité des Rois. Elle avait longuement discuté avec Mirak et Janelle des plans que tous deux avaient pour elle – elle, Reine ? C’était ambitieux, et totalement contradictoire avec le mode de fonctionnement des Torciel. Trop fiers pour se mélanger aux autres, les Rois de Nihilium préféraient depuis toujours se marier aux nobles d’Halgaran plutôt que de renforcer leur politique extérieure. En repensant à cela, un sourire en coin ourla les lèvres claires de la belle.

– Lady Sibelle, nous arriverons bientôt à Port-Royal.

Ses yeux clairs se posèrent sur Angmar, l’un des chevaliers de son escorte personnelle. Au nombre de cinq, leur armure était aux couleurs de la Maison Andores : un griffon rouge sur fond noir, bien loin de la royauté d’autrefois – avant que les Torciel ne deviennent Rois, les Andores arboraient un griffon couronné sur fond noir – mais Drogan I Torciel, premier Roi de Nihilium, jugea leur blason trop royal, et ils durent en changer.

– Combien de temps ?, demanda-t-elle, la voix dure.
– Peut-être bien vingt minutes.

Elle hocha simplement la tête – s’ils étaient si proches, alors ils rencontreraient sans doute un émissaire de la Maison Torciel. Jamais les Andores n’étaient ignorés ou sous-estimés, Mirak s’en était assuré. Et s’il avait placé tant d’espoirs en sa fille aînée, c’était pour que ce respect subsiste bien après sa mort. Angmar fit sonner le cor, annonçant l’arrivée imminente des invités du Roi. Le petit groupe reprit la route au trot. Dressée sur un palefroi gris, Sibelle dirigeait la petite troupe.

Il était peu courant qu’une dame monte ainsi à cheval, et plus encore qu’elle dirige une troupe de chevaliers – mais Sibelle avait appris, au fil de l’enseignement qu’on lui avait inculqué, qu’il fallait trouver un juste milieu entre la noble dame et le féroce chevalier – ainsi, Janelle lui avait appris qu’elle n’était pas vierge au moment de son mariage, et que cela ne l’avait jamais empêchée d’épouser feu Symon I Andores, ancien seigneur de la maisonnée – cela ne l’avait nullement empêchée de devenir une grande dame. Les convenances sont simplement là pour séparer les forts des faibles, disait l’aïeule en ricanant.

– Un homme approche.

Rogenard avait posé la main sur le pommeau de son épée, et il ralentissait maintenant à mesure que l’homme approchait. Les autres hommes de Sibelle se resserrèrent autour d’elle pour la protéger, mais celle-ci capta du regard l’étendard du Roi qui flottait auprès de l’homme. Elle adressa un signe de main à ses gardes, qui calmèrent leur animosité. La jeune femme fit repasser son cheval au pas, et dépassa sa troupe pour aller à la rencontre de l’homme du Roi. Elle lui adressa un signe de tête respectueux.

– Messire. Du coin de l’œil, elle vit ses chevaliers qui gardaient le pommeau de leur épée à portée de main. Lady Sibelle Andores, je viens à Port-Royal à la demande de la Reine.

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La veille, sa majesté avait envoyé une mission à l'homme à la longue chevelure brune. Ce dernier, était assis sur son vieux lit lorsqu'il cassa le seau pour découvrir la contenance du parchemin :

« Chevalier Daegan, Moi, sa Majesté, le Roi vous demande de venir dès l'aube au château. Demain nous avons une invitée très importante pour Madame. Une servante vous attendra dans le grand couloir avec des vivres que vous donnerez à nos invités lors qu'ils arriveront près de nos terres. Gothfrid III Torciel, Roi de Nihilium.»

Ainsi le chevalier du Roi soupa et alla se glisser dans ses draps. Un souffle sur la flamme et la pièce se plongea dans l'obscurité. Daegan fut alors englouti par les ténèbres. Ses ténèbres. Sa belle était devant lui, flottant assez pour que ses pieds n'effleurent le sol crasseux de sa vieille bâtisse. Elle avait le regarde vide, les lèvres bleues, le teint pâle, les cheveux ternes. Elle ne brillait plus, elle avait perdu toute vie. Il la fixa pensant que tout était de sa faute, que jamais il n'eut dû partir. C'était son mari, celui qui devait prendre soin d'elle. La belle mariée chuchota alors une petite mélodie sombre. Ces notes vinrent faire tourner la tête du jeune. La femme se rapprocha, et sa voix qui n'était plus qualifiée de douce mais de terrifiante, devenait plus forte. Malgré qu'elle chantonnait, ses lèvres ne bougèrent pas. Quand il n'eut presque plus de vide entre le visage de l'homme et de la morte, cette dernière hurla. Mais les mots qu'elle prononçait furent inaudible. Quand les notes atteignirent ce qui était le plus aigu, Daegan fit un bond. En sueur, il se retrouva sur son lit, le temps s'était écoulé. Peu de temps après son réveil, les coqs du villages se mirent à chanter.

Sa besace pleine de vivres alimentaires et minérales, le chevalier monta sa monture. D'un mouvement de pied, il tapa sur le derrière de l'animal pour qu'il se mette en marche. Quand il quitta le centre-ville de Port Royal, il augmenta sa vitesse passant au trop, puis au galop quand il fut en campagne. En une trentaine de minutes, il atteint l'entrée du territoire. Personne en vue. Il se cacha un peu plus loin, ne voulant attirer le regard d'autrui sur lui. Le jeune homme se reposa et en profita pour écrire dans son journal qu'il portait toujours dans une poche, sur sa poitrine.

Alors qu'il écrivit ses pensées les plus sombres, il entendit un cor au loin. L'homme rangea son journal, rattacha la besace sur le cheval puis le monta. Il parti au trop jusqu'à la rencontre de la troupe. Voyant que les hommes de gardes ne lui faisaient pas confiance, il prit l'allure au pas. Daegan ignorait qui pouvait être ces personnes. Les seules informations qu'il avait, c'est qu'il s'agissait d'une fille de la famille Andores et qu'elle venait pour la reine. Ce fut exactement ce qu'annonça la blonde qui lui faisait face.

- Madame, dit il en se penchant légèrement pour lui faire la révérence. Messieurs. Je suis Daegan, chevalier du Roi, pour vous servir. Je suis votre serviteur, protecteur et guide jusqu'à ce que vous arriviez dans l'enceinte du château du roi Gothfrid III Torciel, madame.

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Sibelle admira l’étrange charme qui se dégageait du jeune homme avec un sourire en coin. A l’évidence, il n’était pas noble – peut-être était-il chevalier fieffé ? – Sibelle ne les considérait nullement comme des nobles ; elle considérait qu’ils possédaient un patronyme simplement car quelqu’un de suffisamment puissant avait éprouvé de la pitié pour eux. Il exécuta une légère révérence depuis sa monture, saluant la troupe avant de se présenter. Daegan, chevalier du Roi. Elle répondit par un hochement de tête poli.

– Je suis enchantée de vous rencontrer, ser Daegan.

Un sourire léger prit place sur ses lèvres. Se redressant sur sa selle, elle effectua une légère pression contre les flancs de sa monture, la faisant s’avancer jusqu’aux côtés de Daegan. Tournant la tête vers ses gardes, elle leur adressa un signe de tête significatif ; ils la suivirent aussitôt. Elle prit donc tranquillement la route du château, prenant la tête de sa troupe à côté du chevalier.

Elle resta silencieuse pendant de longues secondes, avant de reprendre la parole, sans même prendre la peine de regarder Daegan – naturellement dédaigneuse, elle était bien connue pour cela.

– Pardonnez-moi mon indiscrétion, messire, mais n’avez-vous pas de patronyme ? – Vous avez dû accomplir un exploit pour atterrir au service de Sa Majesté.

Un sourire amusé coula sur ses lèvres – Gothfrid était un homme qui l’amusait profondément ; trop gentil, bien trop gentil. Sibelle était persuadée que seul un homme impitoyable comme son père, Mirak, pouvait régner. Elle avait toujours cru en lui plus qu’en quiconque. Janelle et lui l’avaient forgée à leur image – et cela expliquait les ambitions qu’ils avaient pour elle. Jamais les Andores n’avaient été si proches du pouvoir.

Elle tourna un regard intéressé vers le jeune chevalier – ses yeux légèrement plissés et son sourire en coin étaient indicateurs de sa curiosité sans limite. Elle avait étudié le culte d’Ashir ; elle avait soif d’histoires et de secrets.

– Votre vie doit être passionnante, dites-moi. Racontez-moi votre histoire, ser Daegan. Il nous faudra au moins vingt minutes pour rejoindre le château, et il me faudra encore un temps avant de pouvoir enfin rencontrer la Reine. Nous avons bien du temps pour discuter. Son regard se posa franchement sur lui. Comment un homme sans nom a-t-il pu devenir chevalier du Roi ?

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Daegan tira sur les cordes qui tenaient la tête de l'animal. Ses bras se replia vers gauche afin que la monture fasse demi tour pour se dirigeait vers Halgaran au coté de la demoiselle venue de loin. Son visage était maintenant sans expression. Il n'était pas ici pour se faire des connaissances, c'était une mission par ordre du roi, ainsi l'homme s'exécuta. Le silence était pesant dans la troupe, mais cela ne gênait guère le brun. Jusqu'à ce que la demoiselle décide de rompre ce silence par une question assez personnel envers Daegan. Ce dernier pencha la tête sur le coté, se demandant pourquoi cette information intéresserait la belle, cependant, il ne quitta la route des yeux. Il n'avait guère envie de renseigner la demoiselle sur le pourquoi il était devenu chevalier du roi sans être noble. Malheureusement pour le cavalier, elle ne s'arrête pas à cette question. Elle en demanda d'avantage sur la vie du garçon. Il savait qu'ils avaient bien du temps devant eux, alors bon, pourquoi pas le faire diminuer avec de la conversation. Cependant, il décida de lui en dire le moins possible.

- Je n'ai pas une vie si aventureuse que vous pouvez l'imaginer Lady, dit il en plongeant sa main dans sa besace pour y sortir une gourde. Il la jeta derrière lui, pour les garçons qui les accompagner. Je suis devenu chevalier du roi après avoir sauver le petit neveu du Roi. J'étais déjà soldat pour l'armée du roi depuis bien des années. Je fus promu après avoir sauver une vie royale, voilà tout. Depuis je travaille pour le roi, je suis totalement dévoué envers le roi.

L'homme jeta un coup d'oeil vers la blonde qu'il devait amener au près du roi et de sa dame. Il l'observa, elle avait un visage angélique mais semblait bien plus forte qu'elle en avait l'air. Elle savait monter comme un chevalier, elle se tenait bien droite. Ainsi sa beauté et sa posture rendit le jeune homme curieux. Cependant, il n'avait guère envie de l'importuné à son tour avec des questions. La gourde qu'il avait passé auparavant lui revint après avoir fait le tour des gens de la troupe, également Sibelle. Le chemin redevint silencieux, on pouvait entendre le vent agressait les herbes, les animaux sauvages qui mangeaient ou buvaient, ou encore même se battaient. Le royaume était plus qu'à une dizaine de minute, le chemin devint celui de la campagne avec paysans, qu'il avait autrefois traversé. La civilisation commença à naitre pour remplacer la nature. Bon, le silence fut de trop cette fois ci, il osa.

- Et vous Lady Andores? Pourquoi etes vous sur nos terres? Enfin, pourquoi notre chère dame le désire tant? A votre tour de raconter votre histoire qui à l'air bien plus interessante que la mienne, dit il d'une voix rocailleuse.

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Un long silence s’installa ; il ne souhaitait donc pas répondre. Sibelle tourna lentement ses yeux vers lui, pinçant froidement les lèvres. Elle n’aimait pas qu’on ignore ses questions – surtout lorsqu’on était fils de rien. Elle, était la fille de Mirak Andores – petite fille de Janelle Andores. Elle n’était pas n’importe qui, elle n’était pas personne. Elle était fille d’une des maisons les plus riches de Nihilium, si ce n’est la plus riche – la plus productive, du moins.
Elle était la relève de Janelle, la digne fille de Mirak – elle était quelqu’un.

Finalement, alors même qu’elle allait détourner le regard pour se permettre une remarque piquante – rappelant ainsi à tous que son surnom d’épine d’Arcadia ne lui avait pas été donné pour rien –, ser Daegan répondit. Elle eut un léger sourire en coin, satisfaite.

Il était donc devenu chevalier du Roi en sauvant le neveu de celui-ci. Elle hocha la tête. Partir de simple soldat pour devenir chevalier du Roi, ce n’était pas rien.

– Sauver une vie royale n’est pas rien, commenta-t-elle. Vous êtes sans doute d’une bravoure sans nom, messire.

Ses lèvres s’ourlèrent en un sourire impassible, tandis qu’elle tentait de se remémorer quel était le nom dudit neveu – celui-ci ne lui revenant pas, elle oublia aussitôt. La gourde d’abord envoyée aux hommes de Sibelle lui arriva bientôt, et elle la rendit à son propriétaire sans boire. Elle attendrait de goûter aux délicieux vins que proposait la capitale. Les crus d’Alcantra étaient délicieux, mais n’égalaient pas ceux de Port-Royal – bien que d’autres cités proposaient de meilleurs vins encore.

Daegan la questionna à son tour – un secret pour un secret ; c’était un jeu que lui avait appris sa grand-mère lorsqu’elle était encore enfant, et Sibelle avait toujours aimé jouer à ce petit jeu. Les règles du jeu étaient simples – il s’agissait de livrer quelque chose sur soi pour obtenir en échange des informations sur son interlocuteur. Rares étaient les personnes qui résistaient à la curiosité mordante que suscitait cette interrogation – dis-moi qui tu es et je te dirai qui je suis.

Elle haussa légèrement les épaules, ses yeux clairs se posèrent sur Daegan – elle jouait rarement à ce jeu avec des personnes de basse-naissance. Il ne s’agissait pas d’une discrimination quelconque ; mais l’indiscrétion de Sibelle lui était surtout utile en politique. Tout savoir, tout voir – c’est ce qu’elle avait appris au service du dieu Ashir, dieu du mystère et des secrets.

– La Reine a récemment renvoyé l’une de ses dames d’atour – une histoire de vol, quelque chose du genre. Il faut donc quelqu’un pour la remplacer ; qui de mieux qu’une fille Andores ?, souffla-t-elle avec un sourire mièvre. Ma vie n’est pas des plus intéressantes. J’ai été principalement été élevée par ma grand-mère et mon père – une méthode d’éducation bien différente que celles auxquelles nous sommes habitués. Je n’ai que peu connu de précepteurs.

Elle sourit plus franchement en se remémorant ses jeunes années, lorsqu’elle n’était encore qu’une enfant. Qu’avait-on fait d’elle, si ce n’est une femme assurée et au masque de froideur ? Elle reprit, omettant volontairement son année à l'Arcaneum – en dehors de sa famille, nul ne devait savoir.

– Ma vie n’est devenue intéressante que depuis deux ans, à vrai dire – mon père a choisi de me faire confiance. Il m’a confié de nouvelles responsabilités, autres que celles qui sont habituellement données aux femmes. Je ne devais plus simplement me marier au plus puissant, ni m’entourer des plus riches. J’ai été chargée des missions diplomatiques hors d’Arcadia. J’ai eu la chance de parcourir le monde. Ce qui est dangereux pour une femme seule.

Elle jeta un œil à ses chevaliers, avec un sourire empreint de sympathie.

– Heureusement, j’ai toujours avec moi des hommes fidèles et prêts à me défendre.

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Le chevalier écouta le récit de la jeune blonde. Il est assez surpris qu'un père puisse envoyer sa chère enfant dans une telle situation. Elle n'avait peut être pas la vie dure, mais elle avait beaucoup de responsabilité sur ses épaules. Mais pourquoi pas? C'est vrai, Daegan lui même dès son plus jeune âge, il fut affecté en tant que soldat, ayant la sécurité de Port Royal entre ses mains. Il ne commenta guère ses paroles, il n'avait pas à le faire. Il se devait être respectueux envers cette demoiselle qui avait un statut assez haut. De plus, elle sera donc la nouvelle dame de la Reine, ainsi deviendra une protégée de la famille royale.

Elle devait l'être. Être dame de la Reine. Sa majesté avait aperçu la demoiselle lors d'un bal, elle était au bras de Daegan.  Mais la mort l'emporta quelques semaines avant qu'elle ne puisse commencer. Ce souvenir douloureux fit grimacer le brun. Puis soudainement, les cloches, localisées à Port Royal, sonnèrent. Daegan ne s'arrêta pas pour le déjeuner. Cela ne servait guère car il était à deux pas de l'entrée de la ville et les invités seront beaucoup mieux nourris à la demeure du roi.

Quelques minutes dans un silence de mort, les quatre personne arrivèrent en ville. Quand ils franchirent l'arc qui se dressait à l'entrée de l'immense bâtisse, Daegan posa son regard sur la belle et lui fit la révérence, son visage n'était que sérieux, pas une mine de sourire.

- Madame, dit le chevalier. Notre chemin commun s'achève ici. Vous serez pris en charge par Juliet, servante des invités du roi et de la reine.

L'homme à la carrure assez imposante fit demi tour avec son cheval pour repartir vers sa petite maison. Il se devait de manger, il reviendra plus tard pour voir le roi. Cependant, cette dénommée Juliet invita Daegan a resté. A vrai dire, la petite Juliet, âgée de dix sept ans en craquait pour l'homme, mais ce dernier l'ignorait totalement.

- Monsieur Daegan, vous pouvez rester, je vous ferai un sandwich en attendant que le roi vous accueille. Bien évidemment, vous devez rester près des cuisines, comme vous n'êtes pas officieusement invités à la table..

Daegan ne savait que faire. Il ne crachait pas sur un sandwich offert mais il ne pouvait rester dans le château sans autorisation d'une quelconque autorité. Sa raison l'emporta et déclina l'offre.

- Merci Juliet mais je ne veux risquer votre travail ici, et le mien également. Je tiens au respect des règles. Il fit alors demi tour et salua à nouveau la jeune Andores. Madame, se fut un plaisir. On se reverra peut être dans un futur proche.

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Ils traversèrent la ville, leurs chevaux marchant calmement à travers les rues. Voyant les regards des gens du peuple, habituels, Sibelle jeta un regard en biais à ses gardes – ils comprirent aussitôt le message, gardant leur épée à portée de main. Elle avançait en tête, à côté de Daegan, et la conversation était retombée. Puisqu’il ne chercha pas plus à faire la conversation, elle décida de ne pas faire plus d’efforts de son côté.

Leur traversée de Port-Royal s’acheva donc dans le silence ; Sibelle se contentait de regarder les alentours, l’architecture bien différente de celle typique d’Arcadia. Elle voyait le Palais des Rois qui se profilait, immense et fastueux. Un sourire appréciateur s’étala sur son visage ; elle filait droit vers son avenir, qui s’annonçait aussi glorieux que ce que lui avait promis son père. Tu seras Reine.

– Ma dame. Notre chemin commun s’achève ici. Vous serez prise en charge par Juliet, servante des invités du Roi et de la Reine.

Elle tourna la tête vers Daegan, réalisant qu’ils étaient plus prêts encore que ce qu’elle pensait. Le regard de Sibelle se balada sur les remparts du palais royal, tandis qu’elle réalisait qu’enfin la route était terminée ; elle hocha doucement la tête, un sourire léger aux lèvres. Elle tourna la tête vers Juliet, qui semblait plus jeune encore qu’elle – elle haussa alors un sourcil, il n’était pas courant de voir de si jeunes servantes au service d’une personnalité telle que le Roi.

– Ce fut un plaisir de vous connaître, messire.

La jeune servante proposa à Daegan de manger ici, ce qu’il refusa. Puis faisant demi-tour, il salua une dernière fois Sibelle, avant de s’éloigner. Celle-ci leva le menton, et remit son cheval au pas, entrant dans la cour extérieure du château – jamais elle n’en avait vu de si grand, si somptueux. Son regard ne se teinta pourtant pas d’admiration – jamais elle ne montrerait rien de ses sentiments envieux. Elle descendit de sa monture, en tendant les rênes à un palefrenier sans doute prévenu de son arrivée. Époussetant sa robe, elle leva les yeux – les portes du palais s’ouvraient sur la Reine.

Belle, comme on le lui avait dit – imposante par son regard sévère, son dos tenu droit, ses lèvres pincées. Janna Torciel la regardait, la jaugeait – Sibelle s’avança, fière et digne comme on le lui avait appris, avant d’effectuer une révérence digne des plus grands – digne d’une Reine.

– Votre Majesté, c’est un honneur de vous rencontrer, souffla-t-elle avant de se redresser. Je suis lady Sibelle Andores.

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